"Normalement, nous limitons la signification de nos perceptions. La nourriture est associée au fait de manger ; la poussière nous rappelle qu'il faut faire le ménage (...) Autrement dit, nous faisons entrer tout ce que nous voyons dans un moule commode et familier. Nous excluons de notre coeur toute l'immensité de la perception, toute possibilité d'une perception plus profonde, en restant figés dans notre propre interprétation des phénomènes. Pourtant, il est possible d'aller au-delà de l'interprétation personnelle, de laisser entrer l'immensité dans notre coeur par le véhicule de la perception". [Chögyam Trungpa : Shambala]
Le guerrier évoqué dans ce livre est celui qui, par la pratique de la méditation, garde son coeur large ouvert, celui dont l'héroïsme consiste à se désarmer totalement face au monde. À moi comte, deux mots : toucher, lâcher.
je ne comprends pas très bien ce que peut être une perception plus profonde et l'immensité de la perception. Pouvez vous en dire un peu plus ?
RépondreSupprimerOh oui ! Eh bien voilà : la plupart du temps, nous lisons le monde avec une certaine grille d'interprétation, il est du coup devenu difficile de se laisser toucher par les choses sans les interpréter, avec la fraîcheur d'un nouveau-né qui ne saurait pas par exemple à quoi servent les choses, à quoi elles correspondent. En fait les choses correspondent "avec" (beauté des correspondances) et non "à"(restrictif). Notre perception du monde peut être différente selon les cultures, mais il y a toujours un angle de vue restreint, d'autant plus restreint par notre ego nevrotique qui fait que nous percevons les choses en fonction de nous, dans la dualité "bien pour moi", "pas bien pour moi"....Nous ne les laissons pas dire, nous parlons pour elles.
RépondreSupprimerRegarder la réalité telle qu'elle est, comment dire, dans son innocence et sa nudité profonde, n'a rien d'évident. Nous regardons et écoutons finalement a minima, de même que nous respirons parfois a minima, sans déploiement véritable.
Vous pouvez tenter de lire l'ouvrage de Trungpa, je ne sais s'il vous parlera à vous, qui peut-être ne pratiquez pas la méditation.
J'ai peut-être dit plus, mais je ne sais si j'ai dit mieux, et peut-être ai-je davantage embrouillé, mais c'est difficile à exprimer. Les arts en général explorent cette profondeur mystérieuse juste sous notre nez, tellement en évidence que nous ne la voyons pas. Nous vivons le monde à plat, comme une image, et cela nous met mal à l'aise, nous laisse toujours insatisfait. La méditation crée de l'espace, redonne le volume.
"La poussière nous rappelle qu'il faut faire le ménage" ? ! Non. Je ne la perçois, la poussière, que s'il y a quelqu'un qui va venir en ma maison.
RépondreSupprimerCela dit, je ne sais pas si je "regarde la réalité dans son innocence et sa nudité profonde". Sûrement pas. Mais le travail artistique a cette capacité, cela je le sais.